Vous vous êtes déjà fait arracher une dent pourrie ? Moi oui, et ça fait un peu mal. Mais est-ce que je préférerais que cette dent soit toujours là, ou qu’elle s’abcède et déverse des toxines dans mon sang ? Pas vraiment. Et c’est essentiellement l’argument en faveur de la caudectomie de la plupart des agneaux peu après leur naissance.
« Mais Bill ! » protestez-vous. « La queue d’un agneau est naturelle, et votre dent pourrie était le produit d’années de mauvaises décisions humaines – à savoir vos décisions de manger du chocolat et de ne pas passer la soie dentaire assez souvent. »
Voici un mouton dont la queue n’a pas été écourtée.
En fait, la queue de l’agneau est tout aussi contre nature qu’une dent pourrie. C’est nous qui l’avons mise là, il y a des millénaires. Peu après que les humains aient domestiqué les moutons, nous avons commencé à choisir ceux qui avaient une longue queue grasse, parce que nous aimions manger gras à l’époque.
Comme pour presque tout ce que nous avons fait pour modifier les animaux par l’élevage sélectif, nous sommes allés un peu trop loin, et sommes arrivés au point où la grande majorité des moutons ne peuvent pas soulever toute la longueur de leur queue. Ensuite, nous avons élevé des moutons pour qu’ils aient de la laine plutôt que des poils. La laine est beaucoup plus absorbante que les poils, qui sont pour la plupart autonettoyants. Par conséquent, il y a un risque constant que la laine de la queue soit souillée par l’urine et les excréments et reste humide. Cela crée un terrain idéal pour la reproduction des mouches.
Voici le désordre que ce mouton a fait parce qu’il ne pouvait pas soulever sa lourde queue pour uriner et déféquer.
À la différence de tout autre bétail domestiqué – bovins, chèvres, buffles, et j’en passe – nous avons créé un ensemble de conditions qui exposent les moutons à un risque accru d’infestation par les mouches à viande en rendant leur queue si lourde qu’ils ne peuvent la soulever pour l’éliminer, puis en la recouvrant d’une laine qui retiendra tous les déchets liquides qui la toucheront. Il est de notre responsabilité de les protéger des choix de sélection que nos ancêtres ont fait et qui les ont mis en danger. Cela signifie qu’il faut couper la queue de la plupart des moutons.
Ce que cela ne signifie pas, c’est de couper la queue juste derrière les oreilles. Couper la queue d’un agneau trop court est probablement pire que de ne pas la couper du tout. Cela augmente le risque de prolapsus rectal et vaginal, et laisse la peau nue autour de l’anus et de la vulve exposée aux éléments.
Et cela ne veut pas non plus dire qu’il faut attendre qu’il ait un mois ou deux ans et amputer la queue sans anesthésie.
La plupart des moutons à poils peuvent être laissés sans caudectomie, et certaines races scandinaves et laitières ont des queues naturellement courtes qui n’ont pas vraiment besoin d’être caudectées. Mais la grande majorité des moutons en ont besoin.
Ceux qui s’opposent à la caudectomie disent aussi que nous devrions simplement élever des moutons à queue courte. Mais si vous élevez des animaux depuis très longtemps, vous savez que plus vous sélectionnez de traits simultanément, plus vos progrès sont lents sur un seul trait. Et si vous sélectionnez un seul trait, vous perdez des progrès sur d’autres.
Personnellement, je ne veux pas de moutons à queue courte qui sont de mauvaises mères, qui ne grandissent pas bien, qui ont une mauvaise musculature, qui sont plus sensibles au parasitisme, qui ont besoin d’une assistance à la naissance et qui ont un clip de laine de faible qualité. (Ce ne sont là que quelques-uns des traits que la plupart des bergers sélectionnent et qu’il faudrait désaccentuer au nom de la sélection pour les queues courtes.)
Ils disent aussi que la caudectomie provoque de la douleur et augmente le risque de prolapsus rectal et vaginal, et s’il est vrai que certaines méthodes de caudectomie présentent ces défauts, il est tout à fait possible de caudecter la queue d’un agneau avec un minimum de douleur et avec pratiquement aucun risque de prolapsus rectal ou vaginal.
Bill procède à la caudectomie d’un agneau avec l’aide de Tweed en arrière-plan.
Un protocole de caudectomie sans cruauté
Depuis plus de 25 ans, j’utilise des anneaux en caoutchouc pour caudecter la queue des agneaux. J’ai adopté cet outil parce que c’était un outil que je pouvais utiliser à une seule main et très rapidement. De nombreuses autres méthodes nécessitent deux personnes (l’une tenant l’agneau et l’autre effectuant la procédure), et sont très lentes (un fer chaud prend quelques minutes à chauffer entre deux agneaux).
J’effectue cette procédure lorsque l’agneau est encore très jeune – généralement moins de 24 heures. J’attends que l’agneau ait bien mangé et j’essaie de m’assurer que le lien entre la mère et l’agneau est fort.
Voici le bon endroit pour positionner l’anneau.
Les dernières directives vétérinaires consistent à appliquer l’anneau à l’extrémité distale du pli caudal. Je trouve le point sur la face inférieure de la queue où la peau nue se termine, et j’applique la bague à cet endroit. Cela laisse une queue qui est légèrement plus longue que l’extrémité distale du pli caudal, et qui peut être plus facilement localisée au toucher.
Plus important encore, cela laisse en place toute la musculature qui participe à la mobilité de la queue. Les moutons amputés de cette façon lèvent facilement leur queue pour uriner et déféquer. Ils peuvent agiter leur queue d’un côté à l’autre pour faire fuir les mouches, et la peau nue de leurs régions postérieures est entièrement couverte.
Cet outil vous permet d’étirer l’anneau pour qu’il fasse le tour de la queue. Lorsque vous le relâchez, l’anneau se resserre autour de la queue.
Cette procédure laisse les agneaux avec une queue qui sera de quatre à six pouces de long chez le mouton adulte. Certaines personnes qui ont l’habitude de regarder des moutons de concours appellent cela un manche à balai. Ils peuvent rire tant qu’ils veulent, mais j’ai élevé plus de 10 000 agneaux et je n’ai jamais eu un seul prolapsus rectal. Je n’ai jamais eu de prolapsus vaginal chez une brebis que j’ai moi-même élevée.
Il ne fait aucun doute qu’un agneau, même petit, ressent une certaine douleur lorsque vous appliquez un anneau de caoutchouc sur sa queue. Mais cela ne dure pas longtemps, et le seul comportement de douleur qu’ils manifestent généralement est un battement rapide de la queue. La plupart du temps, ils s’allaitent à nouveau avant que je remette l’instrument dans la poche de mon gilet d’équipement.
Voici le résultat. La partie sous la bande tombe en 7 à 10 jours environ.
Lorsque l’on compare avec l’inconfort de trimballer une queue grasse et détrempée qui ne sert plus à rien et qui peut devenir la source d’une infestation de mouches à viande pouvant mener à la septicémie et à la mort, ces quelques minutes d’inconfort ne me dérangeraient pas si je devais échanger ma place avec l’agneau.
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Il s’agit d’un article de la série « The Best of OP ».