En mars, elle est la maîtresse du roi, installée à Versailles dans un appartement directement au-dessus du sien. Le 7 mai, la séparation officielle entre elle et son mari est prononcée. Pour être présentée à la cour, il lui faut un titre. Le roi achète le marquisat de Pompadour le 24 juin et donne le domaine, avec titre et armoiries, à Jeanne Antoinette, faisant d’elle une marquise. Le 14 septembre 1745, Madame de Pompadour fait son entrée officielle devant le roi, présentée par la cousine du roi, la princesse de Conti. Déterminée à assurer sa place à la cour, la Pompadour tente immédiatement de nouer de bonnes relations avec la famille royale. Après que la reine ait engagé la conversation avec la Pompadour en s’enquérant d’une connaissance commune, Madame de Saissac, la Pompadour répond avec plaisir, jurant son respect et sa loyauté à Marie Leszczyńska. La Pompadour maîtrise rapidement l’étiquette de la cour. Cependant, sa mère meurt le jour de Noël de la même année, et ne vit pas l’accomplissement de sa fille qui devint la maîtresse royale incontestée.
Maîtresse royaleEdit
Par sa position de favorite de la cour, la Pompadour exerçait un pouvoir et une influence considérables ; elle fut élevée le 12 octobre 1752, au rang de duchesse et en 1756, à celui de dame d’honneur de la reine, le rang le plus noble possible pour une femme à la cour. La Pompadour joue effectivement le rôle de premier ministre, devenant responsable des avancements, des faveurs et des révocations des nominations, et contribuant à la politique intérieure et extérieure.
Son importance était telle qu’elle fut approchée en 1755 par Wenzel Anton, prince de Kaunitz-Rietberg, un éminent diplomate autrichien, lui demandant d’intervenir dans les négociations qui ont abouti au traité de Versailles. C’est le début de la Révolution diplomatique, qui voit la France s’allier à son ancien ennemi l’Autriche.
Sous l’effet de ces changements d’alliances, les puissances européennes entrent dans la guerre de Sept Ans, qui voit la France, l’Autriche et la Russie s’opposer à la Grande-Bretagne et à la Prusse. La France subit une défaite aux mains des Prussiens lors de la bataille de Rossbach en 1757, et finit par perdre ses colonies américaines au profit des Britanniques. Après Rossbach, Madame de Pompadour aurait réconforté le roi avec le désormais célèbre : « au reste, après nous, le Déluge ». La France sortit de la guerre diminuée et pratiquement en faillite.
Madame de Pompadour persista dans son soutien à ces politiques, et lorsque le cardinal de Bernis lui fit faux bond, elle porta Choiseul au pouvoir et le soutint et le guida dans tous ses grands projets : le Pacte de Famille, la suppression des Jésuites et le Traité de Paris (1763). Les victoires de l’Angleterre dans la guerre lui avaient permis de dépasser la France en tant que première puissance coloniale – ce qui était généralement reproché à la Pompadour. Mais Madame de Pompadour a soutenu de grands ministres comme Bertin et Machaut qui ont introduit d’importantes réformes fiscales et économiques (commerce, infrastructures, impôts sur le revenu) qui ont fait de la France la nation la plus riche du monde.
Pompadour a protégé l’école des Physiocrates (son chef était Quesnay, son propre médecin) qui a ouvert la voie aux théories d’Adam Smith. Elle a également défendu l’Encyclopédie éditée par Denis Diderot et Jean le Rond d’Alembert contre ceux, dont l’archevêque de Paris Christophe de Beaumont, qui cherchaient à la faire supprimer. Dans le premier roman de Diderot, Les bijoux indiscrets, les personnages de Mangogul et Mirzoza sont des allégories de Louis XV et de la Pompadour respectivement. Diderot dépeint la Pompadour sous un jour flatteur, très probablement pour s’assurer de son soutien à l’Encyclopédie. La Pompadour avait un exemplaire des bijoux indiscrets dans sa bibliothèque, ce qui peut expliquer pourquoi la couronne n’a pas poursuivi Diderot pour une telle indiscrétion contre le roi.
La marquise avait de nombreux ennemis parmi les courtisans royaux qui trouvaient honteux que le roi se compromette ainsi avec une roturière. Elle était très sensible aux libelles incessants appelés poissonnades, analogues à la mazarinade contre le cardinal Mazarin et un jeu de mots sur son nom de famille, Poisson, qui signifie « poisson » en français. Ce n’est qu’avec beaucoup de réticence que Louis prend des mesures punitives contre ses ennemis connus, comme Louis François Armand du Plessis, duc de Richelieu.
Ami du roiModification
Madame de Pompadour a pu exercer une telle influence à la cour grâce au rôle inestimable qu’elle a joué en tant qu’amie et confidente du roi. Contrairement aux précédentes maîtresses de Louis XV, la Pompadour s’est rendue inestimable pour le Roi en devenant la seule personne en qui Louis avait confiance et sur laquelle on pouvait compter pour lui dire la vérité. La Pompadour était un réconfort indispensable pour Louis qui était enclin à la mélancolie et à l’ennui. Elle seule était capable de le captiver et de l’amuser, et divertissait Louis lors de soirées élégantes, d’après-midi de chasse et de voyages parmi leurs différents biens immobiliers.
Vers 1750, le rôle d’amie du roi de Madame de Pompadour devient son rôle solitaire, car elle cesse sa relation sexuelle avec le roi. La fin de cette relation sexuelle fut en partie attribuée à la mauvaise santé de Pompadour, qui souffrait des séquelles de la coqueluche, de rhumes et bronchites récurrents, de crachats de sang, de maux de tête, de trois fausses couches du roi, ainsi que d’un cas non confirmé de leucorrhée. En outre, la Pompadour admet avoir « le malheur d’être d’un tempérament très froid » et les tentatives pour augmenter sa libido avec un régime à base de truffes, de céleri et de vanille sont infructueuses. En outre, en 1750, l’année jubilaire fait pression sur le roi pour qu’il se repente de ses péchés et renonce à sa maîtresse. Afin de consolider son importance en tant que favorite face à ces obstacles, la Pompadour assume le rôle d' »amie du roi » qu’elle annonce par le biais du mécénat artistique. L’annonce de la Pompadour se manifeste surtout par la commande à Jean Baptiste Pigalle d’une sculpture qui la représente en Amitié, s’offrant à une sculpture pendante de Louis XV, aujourd’hui disparue. La Pompadour fit également représenter une sculpture apparentée dans un portrait d’elle-même peint par François Boucher en 1759.
Le sacre et le château de Saint-OuenEdit
Construit dans la seconde moitié du XVIIe siècle, le château de Saint-Ouen, (près de Paris, dans le département de la Seine-Saint-Denis), a appartenu aux prestigieux ducs de Gesvres jusqu’à sa destruction en 1821, pour construire le château actuel pour la comtesse du Cayla. Après la vente de son château de Crécy, contre toute attente, la marquise de Pompadour n’achète pas Saint-Ouen mais bénéficie de l’usufruit de cette demeure de 1759 à sa mort en 1764.
Le plan du château, conçu à l’origine pay Antoine Lepautre, était un U classique et se composait d’une longue façade avec deux ailes prolongeant le corps principal, face à la Seine côté jardin.
L’originalité éclatante de Saint-Ouen résidait dans sa distribution intérieure : le corps principal était constitué d’une succession de trois » salons à l’italienne « , dont la décoration fut entièrement modifiée par la famille Slodtz dans les années 1750 pour la famille Gesvres. Dans l’architecture française, un « salon à l’italienne » est une pièce occupant toute la hauteur d’un bâtiment : l’un des exemples les plus mémorables est le Grand salon de Vaux-le-Vicomte.
En plus de cet aménagement spectaculaire, dès que Mme de Pompadour a acquis le domaine, un vaste projet de réorganisation de l’ensemble des bâtiments (y compris les écuries et les dépendances) a été prévu, coûtant plus que la fabuleuse somme de 500.000 livres !En l’absence des plans originaux, une restitution du rez-de-chaussée a été proposée, permettant d’apprécier le projet architectural de Mme de Pompadour. Il semble que l’architecte qui a supervisé cette réorganisation n’était autre qu’Ange-Jacques Gabriel, qui, à l’époque, dirigeait tous les travaux de rénovation et de construction des différentes résidences de Mme de Pompadour.En utilisant le spectaculaire « salon à l’italienne » central comme pivot, un appartement est créé pour le roi en contrepartie de celui de la désormais Duchesse de Pompadour, faisant du prestigieux château de Saint-Ouen le reflet de son propre statut – symbole de sa victoire sociale et politique.
Malentendu historiqueModifié
Malgré les idées fausses perpétuées par ses contemporains et une grande partie du discours historique, la Pompadour n’a pas supplanté son rôle de maîtresse en employant des amants de remplacement pour le roi. Après la fin de la relation sexuelle de la Pompadour avec Louis, le roi rencontrait des jeunes femmes dans une maison de Versailles créée spécialement à cet effet, appelée le Parc-aux-Cerfs. Ce n’était pas, comme on le dit souvent, un harem ; il n’était occupé que par une seule femme à la fois. La Pompadour n’y participe pas, si ce n’est pour l’accepter comme une nécessité. La seule contribution de la Pompadour à la Parque des Cerfs fut de l’accepter comme une alternative favorable à une rivale à la cour, comme elle le déclara : « C’est son cœur que je veux ! Toutes ces petites filles sans éducation ne me l’enlèveront pas. Je ne serais pas si calme si je voyais quelque jolie femme de la cour ou de la capitale tenter de le conquérir. »
Patron et participant aux artsEdit
Madame de Pompadour était un influent mécène qui a joué un rôle central pour faire de Paris la capitale perçue du goût et de la culture en Europe. Elle acquit cette influence en nommant son tuteur Charles François Paul Le Normant de Tournehem, et plus tard son frère, Abel Poisson, au poste de Directeur Général des Bâtiments, qui contrôlait la politique et les dépenses du gouvernement pour les arts. Elle a défendu la fierté française en construisant puis en achetant une usine de porcelaine à Sèvres en 1759, qui est devenue l’une des plus célèbres manufactures de porcelaine d’Europe et qui a fourni des emplois qualifiés à la région. De nombreux sculpteurs et portraitistes sont patronnés par la Pompadour, parmi lesquels l’artiste de cour Jean-Marc Nattier, dans les années 1750 François Boucher, Jean-Baptiste Réveillon et François-Hubert Drouais. Elle patronne Jacques Guay, le graveur de pierres précieuses, qui lui apprend à graver dans l’onyx, le jaspe et d’autres pierres semi-précieuses.
Pompadour a grandement influencé et stimulé l’innovation dans ce qu’on appelle le style « Rococo » dans les beaux-arts et les arts décoratifs : par exemple, à travers son patronage des artistes comme Boucher et le remeublement constant des quinze résidences qu’elle tenait avec Louis. Comme la Pompadour, ce style a été critiqué par certains comme étant une influence « féminine » pernicieuse, bien qu’il ait été adopté par de nombreux hommes et femmes (Hyde, 456-458). Cependant, il est aussi largement reconnu que Madame de Pompadour s’engageait auprès d’artistes de premier plan afin de capter l’attention du roi tout en cultivant son image publique. L’esquisse à l’huile du portrait perdu de Pompadour par Boucher se trouve dans la salle Starhemberg du manoir de Waddesdon construit par le baron Ferdinand de Rothschild, entourée de porcelaine de Sèvres, une autre industrie qu’elle a grandement influencée et innovée par sa diffusion personnelle à travers un réseau international de sa propre clientèle.
En plus de soutenir les arts en tant que mécène, Pompadour y a également participé plus directement. En plus d’être l’une des rares praticiennes de la gravure sur pierre précieuse au XVIIIe siècle, elle était une actrice de théâtre acclamée dans les pièces jouées dans ses théâtres privés de Versailles et Bellevue (Hyde, 463-4). Melissa Hyde a suggéré que certaines des œuvres d’art réalisées sous la tutelle de la Pompadour par d’autres mains, notamment le portrait de 1758 par Boucher de Mme de Pompadour à sa toilette, peuvent être considérées avec fruit comme des collaborations avec la Pompadour.
Madame de Pompadour est considérée comme une graveuse amateur qui réalisait des gravures d’estampes avec l’aide de Boucher. Elle faisait apporter dans ses appartements personnels à Versailles du matériel de gravure, pour créer les estampes des œuvres de Boucher et Guay
Son esprit politique peut aussi être attribué à sa grande collection de livres. Elle collectionnait des livres influents comme l’Histoire des Stuarts, imprimée en 1760 avec sa propre presse à imprimer, ce qui peut être déterminé par les marques de timbre de ses armes situées sur la couverture. Le baron Ferdinand de Rothschild, un avide collectionneur du XIXe siècle à Londres et à Waddesdon Manor, a rassemblé un certain nombre de ses livres, dont ce livre précédemment mentionné et une copie de son catalogue de livres publié en 1764, qui répertorie l’ensemble de sa collection.
.