Thermothérapie

Rédacteur original – Kirianne Vander Velden

Rédacteurs principaux – Bianca Geeroms, Anja Vanroelen, Kirianne Vander Velden, Ella Rubbens et Kim Jackson

Définition/Description

La thermothérapie consiste en l’application de chaleur ou de froid (cryotherapie) dans le but de modifier la température cutanée, intra-articulaire et centrale des tissus mous avec l’intention d’améliorer les symptômes de certaines conditions. La cryothérapie et la thermothérapie sont des adjuvants utiles pour le traitement des blessures musculo-squelettiques et des lésions des tissus mous. L’utilisation de la glace ou de la chaleur comme intervention thérapeutique diminue la douleur dans les articulations et les muscles ainsi que dans les tissus mous et elles ont des effets opposés sur le métabolisme des tissus, le flux sanguin, l’inflammation, l’œdème et l’extensibilité des tissus conjonctifs. La thermothérapie peut être utilisée dans les établissements de rééducation ou à domicile.

Objectif

Le but de la thermothérapie est de modifier la température des tissus dans une région ciblée au fil du temps dans le but d’induire une réponse biologique souhaitée. La majorité des thermothérapies sont conçues pour délivrer la thérapie thermique à un volume tissulaire cible avec un impact minimal sur les tissus intervenants ou environnants.

  • Chaleur : En augmentant la température de la peau/des tissus mous, le flux sanguin augmente par vasodilatation. Le taux métabolique et l’extensibilité des tissus vont également augmenter. La chaleur augmente l’absorption d’oxygène et accélère la cicatrisation des tissus, elle augmente également l’activité des enzymes destructeurs, comme la collagénase, et augmente le taux de catabolisme.

  • Froid : En diminuant la température de la peau/des tissus mous, le flux sanguin diminue par vasoconstriction. Elle sera suivie ensuite d’une vasodilatation qui préviendra contre les dommages hypoxiques (réflexe de chasse : Si le pack froid est laissé sur la peau pendant plus de 10 minutes, les vaisseaux sanguins se dilatent). Le métabolisme tissulaire va diminuer tout comme l’excitabilité neuronale, l’inflammation, la vitesse de conduction et l’extensibilité des tissus. À des températures articulaires de 30°C ou moins, l’activité des enzymes dégradant le cartilage, notamment la collagénase, l’élastase, la hyaluronidase et la protéase, est inhibée. la diminution du métabolisme limite la poursuite des lésions et aide le tissu à survivre à l’hypoxie cellulaire qui se produit après une blessure.

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Figure 1:Effets physiopathologiques des modalités topiques

Les deux applications peuvent réduire la douleur, mais quand nous devons utiliser quelle application reste la question. Par conséquent, la préférence du patient peut être prise en considération pour décider de l’outil de thermothérapie à utiliser.

Application

  • Chaleur : le réchauffement des tissus superficiels peut être obtenu à l’aide de packs chauds, de bains de cire, de serviettes, de la lumière du soleil, de saunas, d’enveloppements thermiques, de bains/chambres à vapeur. On peut aussi obtenir la chaleur dans les tissus plus profonds par l’électrothérapie (ultrasons, ondes de choc et rayonnement infrarouge).

  • Froid : Le refroidissement est obtenu à l’aide de poches de glace, de bains glacés, de packs de gel réfrigérant, d’air froid et de sprays.

Dans la littérature, on décrit la cryotherapie (application de glace) comme un traitement efficace des blessures des tissus mous. Elle permet de réduire le gonflement et d’améliorer l’amplitude des mouvements. Cependant, il y a encore des doutes quant à son efficacité pour soulager la douleur. Ainsi, l’application de glace peut être utile pour une variété de douleurs musculo-squelettiques, pourtant les preuves de son efficacité devraient être établies de manière plus convaincante.

L’exercice dans l’eau chaude, généralement appelé hydrothérapie ou balnéothérapie, est un traitement populaire et efficace avec un effet de soulagement de la douleur pour de nombreux patients souffrant d’affections neurologiques ou musculo-squelettiques douloureuses. La chaleur de l’eau peut bloquer la nociception en agissant sur les récepteurs thermiques et les mécanorécepteurs, influençant ainsi les mécanismes segmentaires spinaux. Elle a des effets positifs sur l’homéostasie de la barrière cutanée et une activité anti-inflammatoire. En outre, la chaleur peut favoriser la circulation sanguine et la relaxation musculaire. L’effet hydrostatique peut également soulager la douleur en réduisant l’œdème périphérique et en amortissant l’activité du système nerveux sympathique.

Mécanisme d’action

Le flux sanguin cutané est contrôlé par deux branches du système nerveux sympathique : un système vasoconstricteur noradrénergique et un système vasodilatateur actif cholinergique. Ces doubles mécanismes de contrôle neuronal sympathique affectent les principaux aspects des réponses thermorégulatrices sur la majeure partie de la surface du corps humain.

Stress au froid et à la chaleur.png

Figure 2:Réponses du flux sanguin cutané au stress au froid et au stress à la chaleur.

VC = vasocondtriction, VD = vasodilatation

Pendant les périodes d’hypothermie, la baisse des températures centrale et cutanée entraîne une augmentation réflexe de l’activité nerveuse sympathique active vasoconstrictrice pour réduire le flux sanguin cutané et conserver la chaleur corporelle. Pendant les périodes de stress thermique, l’augmentation des températures centrale et cutanée entraîne une augmentation réflexe de l’activité nerveuse sympathique active vasodilatatrice pour augmenter le flux sanguin cutané.

L’effet de la chaleur sur la douleur est médié par les canaux calciques thermosensibles. Ces canaux répondent à la chaleur en augmentant le calcium intracellulaire. Cela génère des potentiels d’action qui augmentent la stimulation des nerfs sensoriels et provoquent la sensation de chaleur dans le cerveau. Ces canaux font partie d’une famille de récepteurs appelés récepteurs TRPV. Les canaux TRPV1 et TRPV2 sont sensibles à la chaleur nocive, tandis que les canaux TRPV4 sont sensibles à la chaleur physiologique normale. Leurs multiples sites de liaison permettent à un certain nombre de facteurs d’activer ces canaux. Une fois activés, ils peuvent également inhiber l’activité des récepteurs puriques de la douleur. Ces récepteurs, appelés récepteurs P2X2 et P2Y2, sont des récepteurs de la douleur médiée et sont situés dans les petites terminaisons nerveuses périphériques. Ainsi, en cas de douleur périphérique, la chaleur peut directement inhiber la douleur. Cependant, lorsque la douleur provient de tissus profonds, la chaleur stimule les récepteurs périphériques de la douleur, ce qui peut modifier ce qui a été appelé le gating dans la moelle épinière et réduire la douleur profonde.

Des études antérieures ont suggéré que la température peut affecter l’échange entre Ca2+ et Na+ dans les cellules neuronales. Elles ont documenté une augmentation à la fois du seuil de douleur (PTH) et de la tolérance à la douleur (PTO) avec l’utilisation du refroidissement.

Vrai ou faux ? Inconvénient : lorsqu’on chauffe la peau, la vasodilatation (VD) détourne le sang des tissus mous situés en dessous et la mauvaise circulation musculaire diminue le métabolisme des muscles…
L’augmentation de la température des tissus superficiels entraîne la libération de médiateurs chimiques, comme l’histamine et les prostaglandines, qui entraînent une vasodilatation. Ces mécanismes vasodilatateurs n’affectent pas de manière significative le débit sanguin dans les muscles squelettiques, car ce dernier est fortement influencé par d’autres facteurs physiologiques et métaboliques. L’exercice est le meilleur moyen d’augmenter le flux sanguin dans les muscles squelettiques.

Traitement

Le traitement dépend du type d’application et du type de maladie.
Il existe 3 phases du processus de guérison : la phase inflammatoire, la phase de prolifération et la phase de remodelage.

  • La première phase, dite phase inflammatoire, protège la zone blessée de toute autre blessure pendant que le corps contient les tissus endommagés. Pendant cette phase, la cryothérapie peut aider à réduire le gonflement. N’utilisez jamais de chaleur pendant cette phase, car la chaleur augmente le flux sanguin dans la zone blessée et accroît le gonflement. La phase inflammatoire a une durée de 2 jours.
  • Pendant la deuxième phase, la phase de prolifération, de nouveaux tissus et du tissu cicatriciel se forment. La chaleur peut maintenant être appliquée sur la zone blessée pour faciliter le processus de guérison.
  • La troisième et dernière phase, la phase de remodelage, est le processus de retour à la santé : la restauration de la structure et de la fonction des tissus blessés ou malades. Le processus de guérison comprend la coagulation du sang, la réparation des tissus, la cicatrisation et la guérison osseuse. La thérapie par la chaleur peut également être utilisée pendant cette phase.

Effets physiologiques

Plusieurs des effets physiologiques locaux de la chaleur et du froid ont été étudiés en profondeur. Par exemple, la chaleur augmente la température de la peau et des articulations, améliore la circulation sanguine et la relaxation musculaire et diminue la raideur articulaire. Le froid engourdit la douleur, diminue le gonflement, resserre les vaisseaux sanguins et bloque les impulsions nerveuses vers l’articulation.

Le chauffage profond est censé diminuer la sensibilité nerveuse, augmenter le flux sanguin, accroître le métabolisme des tissus, diminuer la sensibilité du fuseau musculaire à l’étirement, provoquer une relaxation musculaire et augmenter la flexibilité. La chaleur stimule les thermorécepteurs cutanés qui sont reliés aux vaisseaux sanguins cutanés, provoquant la libération de bradykinine qui détend les parois musculaires lisses, entraînant une vasodilatation. La relaxation musculaire résulte d’une diminution du taux d’excitation des efférences gamma, ce qui abaisse le seuil des fuseaux musculaires et augmente l’activité afférente. Il y a également une diminution du tir du motoneurone alpha vers la fibre musculaire extrafusale, ce qui entraîne une relaxation musculaire et une diminution du tonus musculaire.

Précautions

Une note très importante qui doit être faite est que la thermothérapie est sans danger pour les personnes ayant une sensation cutanée normale. Lorsqu’un patient a des problèmes de sensibilité thermique, cela peut être dangereux. Ils ne peuvent pas sentir s’ils sont brûlés à cause de l’application.

Efficacité

Efficacité

Il y a encore beaucoup de contradictions si l’utilisation de la thermothérapie est efficace ; cependant, dans le monde entier, elle est utilisée pour réduire la douleur.

Bien qu’il existe de bonnes preuves que l’exercice soulage la douleur, améliore la fonction et est rentable, les preuves soutenant l’utilisation d’interventions physiothérapeutiques non liées à l’exercice sont beaucoup plus faibles. L’efficacité de la thermothérapie, de la stimulation électrique neuromusculaire transcutanée (TENS) et des massages a été démontrée. Mais il y a peu de preuves pour soutenir l’efficacité de l’électrothérapie, de l’acupuncture ou de la thérapie manuelle.

Pour l’arthrose du genou, on rapporte que le massage à la glace améliore le mouvement, la douleur et la fonction de l’articulation ; les poches de glace peuvent réduire le gonflement et améliorer le mouvement mais ne soulagent pas forcément la douleur. Dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), les packs de chaleur ou de froid n’auraient aucun effet sur l’œdème, la douleur, le mouvement, la force ou la fonction.

Coût-efficacité

Malgré des preuves conflictantes, la forme simple de la thermothérapie est largement recommandée pour de nombreuses affections musculo-squelettiques car il s’agit d’une thérapie sûre, efficace, facile à appliquer et bien appréciée sur la base de rapports anecdotiques, de l’opinion des experts et des préférences des patients. Les interventions qui peuvent être auto-administrées (thermothérapie, TENS, massage) sont plus susceptibles d’être rentables et moins contraignantes, et donc des options de gestion à long terme beaucoup plus intéressantes. Les modalités thérapeutiques thermiques complexes (chauffage des tissus plus profonds) nécessitent un équipement spécial, une supervision et doivent être délivrées par un thérapeute, ce qui les rend moins accessibles, plus coûteuses et plus risquées.

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Figure 3:Efficacité, rentabilité et praticabilité clinique à court et à long terme des modalités de physiothérapie couramment’

utilisées dans la gestion des affections musculo-squelettiques.

Niveau de preuve : 1C

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